Cela fait cinq ans que nous avons mis au point notre cadre d’investissement sur le climat, qui a abouti au lancement de notre stratégie en juin 2021. À l’époque, nous pensions qu’il s’agissait d’une proposition unique par rapport aux autres offres d’investissement. Compte tenu des déterminants du marché, notre approche semble aujourd’hui plus pertinente que jamais et est bien positionnée pour répondre à la demande future des investisseurs.

Dans cet article, nous interrogeons les gérants Samuel Grantham et Thomas Leys sur les étapes et les réussites de la stratégie jusqu’à présent. 

Qu’est-ce qui rend cette stratégie unique dans votre approche d’investissement ? 

Samuel : De nombreux produits climatiques sont trop axés sur l’optique du portefeuille, comme les objectifs d’émissions ou les étiquettes comme les obligations « vertes ». Ces approches ont leurs mérites mais peuvent limiter l’objectif le plus important : assurer la décarbonation et l’adaptation dans l’économie mondiale. 

Les fonds à faible émission de carbone, y compris ceux dont les indices de référence sont alignés sur l’Accord de Paris, évitent généralement de s’exposer à des secteurs à fortes émissions comme les services publics, favorisant ainsi les secteurs supposés moins polluants comme les services financiers. 
Notre processus est différent. Nous identifions les principales sources d’émissions dans les secteurs critiques : énergie, transport, matériaux, immobilier et industrie. Nous identifions ensuite les entreprises ayant des plans ambitieux et crédibles pour réduire ces émissions. 

Thomas : Ne vous méprenez pas, les fonds d’obligations vertes offrent des avantages aux investisseurs en leur proposant un instrument bien défini qui peut avoir un impact positif sur le plan climatique. Cependant, toutes les obligations vertes ne sont pas égales. D’une part, les investisseurs courent le risque de s’exposer à l’écoblanchiment. D’autre part, les caractéristiques d’investissement peuvent ne pas correspondre à toutes les préférences des investisseurs.

Nous continuons à investir dans des obligations vertes. Cependant, nous utilisons notre propre cadre d’obligations vertes pour garantir la crédibilité et un alignement clair sur notre objectif climatique. Un label peut être un bon indicateur des références climatiques, mais nous étudions une entreprise de manière globale : ses preuves d’ambition, de crédibilité, de réduction des émissions et d’adaptation planétaire au changement climatique. 

L’adaptation au changement climatique est essentielle à la transition climatique, mais elle est sous-représentée dans de nombreux produits. Les obligations jouent un rôle déterminant à jouer compte tenu de la multitude d’instruments dans lesquels il est possible d’investir. Nous pensons que l’adaptation continuera de progresser à mesure que des projets et des financements crédibles seront déployés dans ce domaine. 

Samuel : Même après trois ans, la stratégie reste unique grâce à notre analyse prospective. Nous ne nous appuyons pas sur des données externes rétrospectives ou des labels ESG pour catégoriser nos investissements climat. 

Chaque nom passe par un processus de recherche ascendant, axé sur le climat et piloté par des analystes. Celui-ci est adapté à nos trois piliers climatiques afin de garantir que nous évaluons les facteurs les plus importants. 

Comment identifiez-vous les bonnes opportunités d’investissement, hormis les obligations vertes ? 

Samuel : Tout d’abord, nous aidons nos clients à saisir les opportunités climatiques en investissant dans des obligations « investment grade » et à haut rendement sur les pays développés et émergents. Nous investissons jusqu’à 50 % dans les pays émergents et jusqu’à 40 % dans les obligations à haut rendement. Cette approche nous permet de nous positionner sur des segments de marché porteurs de rendement. Elle nous permet également d’investir dans des entreprises à différents stades de la transition climatique et dans le plus large éventail possibles de secteurs. 

Thomas : Puis, comme je l’ai indiqué précédemment, notre stratégie est plus qu’une stratégie d’obligations à faible émission de carbone ou d’obligations « vertes ». Nous aidons les entreprises de tous les secteurs à mener à bien la transition climatique, en privilégiant les entreprises ambitieuses qui contribuent activement à la décarbonation de la planète, à la transformation de l’industrie, à la perturbation des secteurs, aux nouvelles technologies et à la satisfaction des besoins en constante évolution des clients.
 
Nous pensons que ces entreprises « best-in-class » (meilleures de leur catégorie) sont bien positionnées pour bénéficier de la croissance des investissements en faveur de l’action pour le climat et potentiellement surperformer leurs pairs. Pour cela, nous identifions les investissements sur trois piliers.

  • Leaders : 
    Ils investissent dans les secteurs les plus performants en matière de réduction des émissions. 
  • Solutions : 
    Soutenir les fournisseurs de solutions en proposant des produits et des services permettant la décarbonation de l’économie au sens large. 
  • Adaptateurs : 
    Ils investissent dans les entreprises qui contribuent à l’adaptation au changement climatique en aidant les sociétés à s’adapter aux conséquences du changement climatique. Cela inclut les émetteurs d’obligations vertes, municipaux et sub-étatiques qui utilisent le financement obligataire pour des projets résilients au changement climatique. 
Thomas : Ces trois piliers montrent précisément comment nous identifions le potentiel de hausse au-delà des obligations vertes. Nous nous concentrons sur l’impact climatique, qui peut provenir d’obligations vertes ou brunes (émetteurs levant des capitaux pour passer à des activités commerciales plus vertes). Cela offre un potentiel de croissance plus important et un éventail d’opportunités plus large que les obligations 100 % vertes. 

Quel est l’aspect de la stratégie dont vous êtes le plus fier ? 

Samuel : la stratégie des obligations en faveur de la transition climatique a un double objectif : le climat et le rendement. Après trois ans, sommes en mesure de démontrer que ces deux objectifs sont liés et peuvent être réalisés ensemble sans compromis. 

Je peux vous faire part de quelques faits marquants observés sur le plan climatique : 

Nos investissements dans des obligations émises par des entreprises dans le cadre des piliers Leaders et Solutions ont contribué à atténuer les causes du changement climatique à travers le financement d’activités de décarbonation. Voici un aperçu de l’impact cumulé de ces entreprises sur trois ans : 
  • Ils ont fourni 40 GW de capacité d’énergie renouvelable, portant ainsi la capacité renouvelable totale des entreprises de notre portefeuille à plus de 200 GW. La capacité cumulée fournie par les entreprises est capable d’alimenter 150 millions de foyers. 
  • Ils ont contribué à éviter des dizaines de millions de tonnes de CO2 grâce au chauffage, à la climatisation et au transport électriques fournis par nos entreprises.
  • Ils ont investi plus de 15 milliards de dollars dans des propriétés écoénergétiques à l’échelle mondiale.
  • Ils ont facilité des milliards de déplacements en transports publics et produit des centaines de milliers de véhicules électriques grâce à des investissements dans les transports à faible émission de carbone.
En outre, les entreprises détenues dans le portefeuille au titre des piliers Adaptateurs ont financé la résilience et l’adaptation au changement climatique. Parmi les faits marquants, on peut citer :
  • Ils contribuent à réduire les risques d’incendie par l’installation de milliers de kilomètres de câbles électriques souterrains.
  • Ils contribuent à réduire les risques de sécheresse en économisant des milliards de litres d’eau chaque année grâce à l’amélioration de l’entretien des infrastructures, du captage de l’eau et de l’irrigation. 
  • Ils atténuent l’effondrement des écosystèmes en s’engageant à préserver des centaines de milliers d’hectares de forêts. 
  • Ils fournissent des solutions de prévention des inondations sur trois continents.
Thomas : La stratégie a été lancée en juin 2021. Il faut dire que les marchés ont été volatils au cours de cette période. Cela a mis en évidence les points forts de notre approche. En 2022, alors que nous avons connu l’une des pires périodes jamais enregistrées pour les actifs obligataires, nous avons nettement surperformé notre indice de référence, ainsi que les indices mondiaux d’obligations « investment grade » et d’obligations vertes. En 2023, lorsque les marchés se sont redressés, la stratégie a participé à la reprise, surperformant à nouveau son indice de référence, ainsi que ses indices mondiaux des obligations « investment grade » et des obligations vertes.

Quelles sont vos perspectives en matière d’investissement climatique, compte tenu des nombreuses distractions des marchés en matière d’investissement durable ? Les actifs sont-ils surévalués ?

Thomas : L’attention croissante portée à la durabilité environnementale à l’échelle mondiale signifie que les perspectives sont prometteuses. Toutefois, nous ne pensons pas que ces actifs seront surévalués uniquement en raison de la demande croissante. Si les investissements axés sur le climat suscitent de plus en plus d’intérêt, les opportunités de transition climatique sont vastes et en constante évolution. 

Plus important encore, notre stratégie a pour double objectif d’avoir un impact positif sur le climat et de générer un rendement. Nous intégrons des recherches approfondies sur le climat aux meilleures idées d’investissement de nos analystes, c’est-à-dire celles qui ont le potentiel de générer un rendement attractif.

Par conséquent, même si nous pouvons trouver des opportunités intéressantes sur le plan climatique, nous n’investirons pas si nous estimons qu’elles sont surévaluées. 

En outre, le domaine de la transition climatique est dynamique, avec des avancées constantes en matière de technologie, de réglementation et de comportement des consommateurs qui offrent de nouvelles opportunités d’investissement. Nous pensons donc qu’il y a un grand potentiel de croissance et d’innovation, de sorte qu’il est peu probable que ces actifs soient surévalués uniquement en raison de la demande croissante.

Qu’espérez-vous accomplir au cours des trois prochaines années ? 

Samuel : Après trois ans, nous estimons avoir démontré notre capacité à atteindre nos objectifs en matière de climat et de rendement. Nous nous efforcerons de maintenir cette barre haute. 

Nous pensons qu’il existe un fort potentiel pour générer des rendements totaux attractifs pour nos clients. La dynamique des marchés, caractérisée par une croissance plus faible, un éventuel cycle de baisse des taux des banques centrales et de bons fondamentaux des entreprises, constitue une toile de fond favorable. 

Sur le plan climatique, nous poursuivons nos recherches sans relâche. Nous continuerons à œuvrer pour trouver les meilleures idées dans tous les secteurs. Nous avons déjà constaté des progrès considérables de la part des entreprises dans lesquelles nous investissons. À l’avenir, nous continuerons à rechercher les entreprises qui ont le plus grand potentiel de décarbonation et d’adaptation.